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Jack-up vessels : les bateaux ont des jambes

L’évolution des travaux maritimes et le développement des énergies offshore nécessitent des grues toujours plus grosses. Pour cela, magie de l’évolution, les bateaux se sont fait pousser des jambes… Découverte d’un de ces géants à grands pieds!

Les jack-up

Les plateformes de type jack-up ou plateformes auto-élévatrices existent depuis les années 50. Elles ont été développées pour le forage pétrolier. Ces engins étaient remorqués sur place et ne constituaient pas un navire par eux-mêmes. Ils sont encore nombreux. L’histoire de leurs développements est tellement riche qu’elle pourrait faire l’objet d’un article en soi. Ces étapes ont permis la mise au point des techniques de levage actuelles. Les pieds assurent au navire la stabilité nécessaire aux travaux. Une série de vérins hydrauliques et de butées permet au navire, une fois le pied descendu au contact du fond, de se lever le long de ceux-ci. La vidéo ci-après présente un exemple de ces mécanismes.

 

MPI Adventure : taillé pour l’installation éolienne

Nous nous intéresserons désormais au MPI Adventure, bon exemple des nouveaux géants sur pieds, destinés à l’éolien offshore. Le développement des champs de production électrique au large a nécessité la conception d’outils adaptés. Le mât d’une éolienne de 6 MW comme Alstom met au point actuellement, mesure 100 m de haut. Les dimensions du navire sont donc en conséquence.

Longueur hors-tout: 138.55 m

Largeur : 40.80 m

Creux (Hauteur de la quille au pont principal) : 10 m

Tirant d’eau de travail minimum : 4.09 m

L’installation pouvant avoir lieu dans des zones de faible profondeur, il est nécessaire de limiter le tirant d’eau. La surface nécessaire au chargement étant importante, le compromis amène donc à des navires larges et à faible creux.

Positionnement dynamique et stabilité

MPI Adventure au port

MPI Adventure au port

L’emplacement des éoliennes doit être précis afin de pouvoir se connecter correctement au réseau. La qualité du fond ayant été préalablement étudié, les fondations doivent reposer à l’endroit prévu. Pour cela, deux facteurs sont primordiaux : contrôler la position du navire et s’assurer qu’il soit stable pour que le levage soit propre.

Pour répondre à la première contrainte, le MPI Adventure est équipé d’un système de positionnement dynamique de dernière génération dit DP2. Il s’agit d’un système combinant plusieurs GPS et capteurs de mouvement ainsi qu’un automatisme régulant l’action des propulseurs afin de maintenir le navire en position.

Assurée la position, viennent enfin les pieds. Dans notre cas, six pieds mesurant chacun 72.84 m, permettent de soulever le navire. Ils assurent ainsi que la grue opèrera sans être dérangée par les mouvements de ballant dûs aux vagues. Chaque pied, de section carré, est en tôle épaisse. Il reprend en condition normale 3.75 T et peut supporter 7.5T en conditions extrêmes. La vitesse de levage est de 1m/min. Le choix du type de pied et de son nombre est le fruit d’un compromis.

Les pieds carrés choisis ici assurent un bonne compacité, à moindre coût, libérant le pont pour la charge utile. De plus, ils s’adaptent à un système de levage simple. En contrepartie, le poids est élevé et ils endurent des efforts importants dûs aux vagues sur les surfaces planes. Les pieds en treillis, tout comme les pieds à section ronde, adoptés dans d’autres design permettent une plus grande légèreté, moyennant un coût plus élevé.

Le choix de 6 pieds et non 4 comme souvent permet d’en limiter la taille et par la même la largeur du navire. Celui-ci garde donc des proportions autorisant une meilleur vitesse de transit. Ce facteur est en effet devenu critique avec l’éloignement progressif des installations par rapport à la côte. En contrepartie, la zone de stockage est plus fractionnée, ce qui peut s’avérer pénalisant avec de long colis. La redondance assure également une sécurité en cas d’incident sur un pied.

Opérabilité

MPI Adventure en opération

MPI Adventure en opération

Les éoliennes nécessitent du vent. Elles sont donc souvent installées dans des zones sujettes à de fortes tempêtes. Bien que l’on privilégie les fenêtres météo favorables, il est nécessaire de pouvoir supporter des conditions sévères. Le MPI Adventure peut opérer avec 2.8 m de vague, 14 m/s de vent et 2 noeuds de courant simultanés. Il est conçu pour « survivre » sur ses pieds jusqu’à 10.3 m de houle, 36 m/s de vent et 2 noeuds de courant. Evidemment, en flottaison, le navire peut affronter des conditions plus dures.

Polyvalence

L’éloignement des champs éoliens impose au navire d’être autonome afin de limiter les coûts d’exploitation. Celui-ci assure donc le transport et l’installation de l’ensemble des équipements : de la fondation aux pales. Il est par conséquent doté d’un pont de grande dimension (3600 m²) et adapté aux charges lourdes (10 T/m²). Les grues permettent de soulever jusqu’à 1000T à 25 m, bien plus que de nombreuses consœurs terrestres!

Mais le navire est également hôtel, accueillant jusqu’à 112 personnes, dont de nombreux techniciens peu amarinés. Le confort est donc de mise avec sauna et salle de gym. Certains disposent même de cinéma!

Même s’ils n’avancent pas avec, les bateaux peuvent donc avoir des jambes….

Pour en savoir plus :

Vidéo sur le schéma classique d’installation éolienne

 Crédits photographiques (licence CC BY-NC 2.0) :

MPI Adventure au port : Carron Brown

MPI Adventure en opération : Chris

 

 

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