Garde–côtes, des navires variés pour des fonctions multiples (1/2)

L’actualité méditerranéenne récente et le drame des 300 naufragés de Lampedusa ont donné l’occasion de rappeler le rôle essentiel des garde-côtes dans la surveillance du domaine maritime. Les images des victimes entassées sur les vedettes des secours italiens m’ont amené à me demander si les moyens à disposition répondaient réellement aux nécessités. Définir plus généralement la notion de garde-côte s’est avéré nécessaire.

L’état des lieux de la situation dans différents pays montre à quel point l’expression cache des réalités différentes. La définition commune selon Wikipédia est la suivante :

 Un corps de garde-côtes ou une garde côtière est une organisation nationale responsable de l’action civile de l’État en mer. Il est chargé de missions de police maritime (lutte contre les trafics illégaux en mer, police de la navigation), de sécurité civile en mer (recherche et sauvetage) et, dans certains pays, des aides à la navigation (balisage, service de brise-glace, etc.). D’une manière générale, il est responsable de l’application des lois de l’État dans les zones maritimes sous sa juridiction (mer territoriale, ZEE…), ainsi que des règlements internationaux.

A ces fonctions, s’ajoutent depuis quelques années la protection du milieu marin et la lutte contre la pollution.

Chaque pays a son organisation avec un statut original. Nous détaillerons ci-après la structure dans plusieurs états. Nous montrerons en quoi un environnement propre et le fait de privilégier certaines fonctions amènent à des bateaux différents.

Le Canada

La garde côtière canadienne (GCC) est un corps civil dépendant du Ministère des Pêches et des Océans. Elle a reçu les cinq mandats suivants :

•  Sûreté maritime
• Protection des milieux marins et d’eau douce
• Facilitation du commerce des échanges et de l’accessibilité maritime
• Soutien des sciences maritimes
• Soutien des priorités maritimes fédérales du Canada.

La GCC dispose d’une flotte variée et nombreuse, pour couvrir la plus longue côte du monde: 243 042 kilomètres. Cette flotte regroupe des grands navires (jusqu’à 72m de long pour les plus gros brise-glaces), des vedettes de sauvetage, des hélicoptères et même des aéroglisseurs permettant d’accéder facilement dans des zones peu accessibles. Les embarcations vieillissantes sont pour partie en cours de renouvellement. Il est à noter que la flotte gérée par la GCC est mise à disposition d’autres organismes d’état pendant 30% du temps. Les 70 % restant se répartissaient en 2010-11 comme suit :

• 77% de sauvetage
• 13.3% d’entretien des phares et balises
• 9% de déglaçage selon l’expression de nos cousins canadiens!

L’institution s’appuie aussi sur les volontaires bénévoles des garde-côtes auxiliaires. Ceux-ci assurent des missions de sauvetage à l’image de la SNSM en France. L’état prend en charge les frais de fonctionnement, l’investissement dans le matériel étant financé par les dons.

Nous nous intéresserons ici à une spécificité canadienne, l’aéroglisseur. Voici les caractéristiques principales des modèles en service dans la GCC.

NGCC Mamilossa et Sipu Muin

Longueur : 28.5 m
Largeur : 12 m
Tirant d’eau en charge : –
Puissance : 3 281 kW
Vitesse maximale : 50 noeuds
Vitesse de croisière : 45 noeuds
Lancement : 2009

Mention de source : Pêches et Océans Canada P. Dionne

 

Ces aéroglisseurs permettent, grâce à leur absence de tirant d’eau, le transport d’une charge utile de 22 tonnes dans des zones inaccessibles même aux brise-glaces en hiver. De plus, leur design offre un large pont pour le transport de marchandises volumineuses et la grue permet d’approvisionner les communautés isolées du nord canadien de manière autonome.

Leur vitesse de pointe permet de réaliser des missions de sauvetage dans les meilleurs délais et dans des conditions climatiques où les hélicoptères ne pourraient pas nécessairement opérer.

Les aéroglisseurs répondent donc à un besoin spécifique du grand nord canadien.

 

Les USA

L’United States Coast Guards (USCG) est un corps fédéral composé de militaires. Il est considéré comme la cinquième arme après l’US Army, l’US Air Force, l’US Navy et les Marines. Pourtant, il est depuis 2003 sous la direction du ministère de l’intérieur. La loi prévoit néanmoins qu’il repasse sous contrôle du ministère de la défense en cas de conflit. Son rôle de protection du territoire est fortement ancré dans son identité depuis sa création le 4 août 1790 peu après la naissance des Etats-Unis d’Amérique. Clin d’œil historique au Revenue Cutter Service des origines, en charge des activités de douane et de défense côtière d’un pays balbutiant, les navires de grandes dimensions sont toujours appelés cutters bien que loin d’être des cotres au sens originel de cutter, terme désignant un type de voilier.

En 1915, les Revenue Cutters fusionnent avec la US Life-Saving Service. Cela marque le début de l’ère moderne de l’USCG. Elle acquiert alors une nouvelle devise, étonnante pour un corps militaire, « So Other may live », (pour que les autres puissent vivre). Depuis 1915, la garde côtière américaine engrange régulièrement des compétences supplémentaires. En 1939 elle reprend la fonction d’entretien des phares et balises, puis en 1942 le rôle d’inspection maritime des navires. Elle a aussi son propre service de renseignement.

Du point de vue de la flotte, l’USCG possède des moyens importants et de grande taille. Elle a ainsi 12 cotres de 115 m et 3 de 127m, fortement armés. Elle arme aussi un trois-mâts barque comme navire-école, opère des drones ainsi que de nombreuses embarcations de taille moyenne. Il est à noter que malgré un chantier naval propre à Baltimore depuis 1899, la moyenne d’âge des navires de plus de 20 m en 2010 était de 40 ans. Un programme de modernisation est en cours dans toutes les tailles de navires. (voir lien http://www.uscg.mil/acquisition/programs/acquisitionprograms.asp).

Les exemples ci-dessous montrent l’adaptation des navires américains aux spécificités des usages de l’USCG

 

Des navires fortement armés pour les missions de défense du territoire (voir les canons en plage avant)

Des moyens facilement déployable à l’étranger. L’USCG a été impliqué dans les campagnes extérieures des Etats-Unis (Irak etc..)

Ces deux exemples nord-américains, montrent une forte intégration des moyens dans une entité publique unique. Les exemples européens développés en deuxième partie montreront une tradition différente.

Crédits photographiques (Sous licence CC BY-NC-ND 2.0) :

Aéroglisseur canadien : MPO-DFO_ Quebec

Cutter et patrouilleurs de l’USCG : Coast Guard News

Chargement d’une vedette aérotransportable : US Coast Guards