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Protection du littoral : stratégies et enjeux régionaux

En me promenant sur les côtes françaises, je ne cesse de me réjouir des actions du Conservatoire du Littoral. D’un pays à l’autre, les littoraux peuvent avoir, au-delà de leurs spécificités naturelles, des aspects bien différents… Voici donc un petit aperçu des politiques publiques cachées derrière ces réalités.

Le littoral : Terre ou Mer?

Site du conservatoire du littoral

Site du conservatoire du littoral

Cette question, d’ordre quasi-philosophique, peut sembler de peu d’intérêt pour la protection du littoral. La réponse a néanmoins de lourdes conséquences sur sa gestion. Zone frontière, le littoral concilie les deux éléments. Pourtant, la tendance est de se focaliser sur le patrimoine sous-marin, délaissant la partie terrestre soumise à une exploitation commerciale peu contrôlée.

De nombreux pays disposent d’aires marines protégées, qu’il est possible d’étendre aux eaux internationales. Leur développement mériterait un article à lui tout seul, mais quitterait le domaine littoral. Notons tout de même que la protection de millions de km² d’océan peu fréquentés est moins dangereux politiquement que la régulation de quelques centaines à proximité des côtes. Les usagers-électeurs y sont plus nombreux. Barack Obama a ainsi agrandi le Pacific Remote Islands Marine National Monument, le portant à 1.3 millions de km².

Dans quelques pays, la bande littorale terrestre est également protégée. C’est à ce sujet que nous nous intéresserons plus avant.

Une fois n’est pas coutume, la France fait figure de référence en la matière. Les deux outils de cette politique sont la loi littoral de 1986 et le Conservatoire du Littoral qui fête cette année ses 40 ans. Ils permettent de concilier une approche législative contraignante d’une part et une volonté de gestion patrimoniale active de l’autre. Le littoral du conservatoire est définitivement terrestre, à l’image des 159 003 ha qu’il protégeait au 12 février 2015. On peut d’ailleurs mesurer sur son site le travail de fourmi qu’il réalise. Un compteur global indique la surface protégée. Les dernières acquisitions y sont présentées.

Protection ou restauration?

En fonction du contexte économique et culturel du pays, l’approche est extrêmement variée. Les pays riches à forte densité de population insistent sur la protection de ce qu’il reste de naturel sur leurs côtes. C’est le cas de la France, de la Sardaigne ou du Royaume-Uni. L’accent est mis sur la biodiversité. Les sites protégés sont un poumon « vert et bleu » prisé des citadins. Le travail d’aménagement est donc particulièrement important.

Déchets plastiques

Déchets plastiques

L’usage du littoral est généralement différent dans les pays plus pauvres. Quelques zones densément peuplées subissent une pollution importante entraînant une forte dégradation de l’écosystème. Parallèlement, de grandes superficies restent inaccessibles. Souvent par le biais de la coopération internationale, les autorités mettent en place une politique de valorisation et de protection des sites naturels encore vierges. D’autre part, elles tentent de restaurer les zones détériorées à proximité des villes. L’action de l’APAL (Association pour la Protection et l’Aménagement du Littoral) en Tunisie est un bon exemple. Elle travaille à la restauration des sebkhas polluées en périphérie urbaine et valorise les fronts de mer en y finançant la construction d’infrastructures.

Le financement : public ou privé?

Les actions évoquées ci-dessus ont un coût élevé. Il est donc nécessaire de lever des fonds. Comme pour d’autres domaines, deux optiques s’opposent. De nombreux pays, comme la France, considèrent que la puissance publique est responsable de la gestion de ce patrimoine commun. Les financements y sont principalement publics, les dons venant compléter les budgets des agences de l’Etat. Il en est ainsi en France et dans plusieurs pays du Sud. Dans des pays plus décentralisés, il peut s’agir de compétences régionales, à l’image de la Sardaigne. Cela entraîne malheureusement une disparité importante entre les régions.

A l’inverse, des pays comme le Royaume-Uni font appel aux fonds « privés ». Le National Trust en est le parfait exemple. Cette ONG gère de nombreux sites, dont plus de 1000 km linéaires de côte. L’association, créée en 1890, fonctionne grâce à de nombreux bénévoles. Son statut ne lui permet pas, à la différence des organismes publics de préempter des terrains.

Nouvel objectif: la GIZC

Plage de Grande Anse - Deshaies

Plage de Grande Anse – Deshaies

Après avoir exploré les aspects nationaux, il est temps de prendre de la distance et de raisonner de manière plus globale. La coopération existe déjà, notamment dans le bassin méditerranéen. L’Europe, à travers différents programmes, cherche à promouvoir le concept de GIZC, gestion intégrée des zones côtières. Son but est la limitation des conflits d’usage. La lecture du sigle GIZC est résumé ainsi par l’Institut Français de la Mer :

  • gestion : caractère dynamique du traitement des problèmes
  • intégrée : examen simultané de tous les problèmes et recherche d’une solution globale
  • zones côtières : traitement simultané de la terre et de la mer.

Malgré des politiques différentes selon les pays, il est intéressant de noter l’importance donnée au littoral dans les efforts actuels de protection de l’environnement. Ce milieu est le terrain de multiples activités. Ne le fossilisons pas. Apprenons à le partager entre pêcheurs, randonneurs, plaisanciers, plongeurs et tous les usagers, en mer comme à terre!!

Pour plus d’informations :

Conservatoire du littoral

Association tunisienne APAL

Sardegna coste

National Trust

Tout sur le littoral européen : coastalwiki.org

Crédits photographiques :

Site du Conservatoire du Littoral : Dany Tolenga (licence CC BY-NC-ND 2.0)

Déchets plastiques : Marcovdz (licence CC BY-NC-ND 2.0)

Plage de Grande Anse : Mer360

 

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